Enseigner avec la VMC

Une année en VMC avec ma classe ep-02

02.12.2019

Philippe Ruffieux avatar. Philippe Ruffieux

2019.12.01

Point de situation
Que s'est-il passé en 5 semaines? Les 7 premières semaines ont fait l'objet d'un précédent article. Il est temps de décrire la suite, soit les semaines 8 à 12.

J'ai rendu les résultats du test significatif. Les résultats étaient très bons dans l'ensemble à part trois élèves. Le test a été réalisé dans la classe parallèle et leur résultat l'est également.
Des trois, deux ont manifestement des difficultés importantes. Un est passé (quand même) sous le radar. Ce fut une déception. Le deuxième avait montré des difficultés auxquelles je m'attendais, mais pas à ce point et le troisième a d'autres difficultés d’intérêt général pour l'école.
J'ai remarqué que ces élèves, malgré un coup de massue vu la note catastrophe, n'ont pas baissé les bras. Au contraire. Les deux premiers élèves en difficultés ont d'ailleurs plus participé que les autres et je m'attends à un retournement de la situation. Pas de miracle, mais un progrès notable. Nous le saurons bientôt. Le troisième semble s'y mettre gentiment. Donc, j'y crois. Personne n'a décroché. On est tous dans le même bateau. 

Une première leçon sur les brevets

Lors d'une séquence de 2 périodes avec iPad, j'ai mis l'accent sur les brevets. En effet, j'ai remarqué que les élèves n'étaient pas encore dans cette logique. Lorsqu'ils avaient de l'avance, ils demandaient plutôt d'autres exercices ou attendaient simplement. Il en a résulté que très peu d'élèves sont passés à l'étape "je passe un brevet" et un seul en avait créé un. Comme tous devaient être prêts pour le test à venir, j'ai donc distribué suffisamment de brevets à la classe pour que chacun puisse s'investir sur ce rôle ; les élèves qui le pouvaient étaient invités à en créer.
D'habitude, je ne fais ce genre de leçon plus tard dans l'année, lorsqu'il y a beaucoup de compétences. Mais là, je voulais que chacun puisse passer par cette étape avant le premier test.

Le risque de mettre tous les élèves sur les brevets est que cela ne fasse pas sens à certains et qu'ils errent sans but. Ce ne fut pas du tout le cas et tous ont oeuvré dans le bon sens. L'investissement était clairement dirigé vers cette tâche. D'ailleurs c'est la création plus que la validation qui a entraîné le mouvement, certains oubliant même qu'ils devaient être experts pour avant de créer un brevet.

La suite pour moi fut un tiraillement entre l'avancée dans les compétences et les incitations à maintenir leurs échanges. Je vois que pour l'instant, dès que je donne une direction vers des tâches, ils en laisse tomber les brevets. Cette classe a donc une belle énergie pour s'investir dans ce que je leur propose, mais n'a pas encore la capacité d'autonomie de décider ce qui est profitable pour chacun.

Les changements et les habitudes

Les élèves commencent pour autant à bien gérer l'autonomie dans leurs tâches et travaillent donc assez à leur rythme sans profiter trop de la liberté. J'ai dû être remplacé plusieurs fois ce mois-ci et ce fut donc très facile pour tous de continuer les tâches en cours ; même avec un enseignant qui n'a aucune idée de la VMC.
Je vois que les élèves progressent énormément dans la collaboration. Ils échangent volontiers sur les maths. Pourtant, je vois quelques tensions entre certains élèves apparaître. Deux groupes de garçons me demandent continuellement de travailler ensemble, surtout un ne veut pas rester à côté d'une camarade. Je considère ces petites tensions normales. Il faut les gérer et c'est peut-être dû aux collaborations qu'elle émerge à ma vue.
Au niveau de l'usage du numérique. Il fait toujours son petit effet. Très utile pour faire le suivi individuel des tâches et brevets, il n'est pas encore utilisé pour chercher les experts. Un effet très marqué est au niveau du bruit. Dès qu'ils ont leur tablette, le silence s'installe. Ah ; c'est important aussi que je précise que j'ai dû régulièrement réguler le volume de parole. Les élèves ont tendance à oublier de chuchoter et le volume devient vite trop important pour la concentration de tous. Mais dès qu'ils ont leur tablette, ils sont comme happés par la machine… Je dois vraiment questionner ce point dont je ne sais pas si c'est positif ou non. D'un côté, je me dis qu'il y a une distraction par l'outil. Ils adorent écrire des messages. Juste pour écrire, pas pour les maths. Mais je laisse faire tant qu'ils restent dans une norme. Et donc, de l'autre, ils bossent et font tout de même leurs tâches dans le calme. Pour la collaboration, je pense qu'il y a moins d'échanges directs sur les maths. Les élèves étant plus dans une posture individuelle et ne recherchent le lien que lorsqu'il y a un besoin important, comme la validation d'un brevet.
C'est un point que je dois observer plus précisément et méthodiquement.

Et la communauté?

Un autre point qui me concerne. Bien que j'aie l'habitude de faire tout cela depuis des années, je peine à tenir à jour les contenus. J'ai une compétence par exemple (exécuter une marche à suivre) qui n'a que des exercices, mais pas de descriptif complet. Là, je me dis de plus en plus qu'il faudrait mutualiser et coconstruire avec d'autres profs de maths une communauté bien ficelée à l'avenir afin d'éviter du travail.
Mi-novembre, je suis intervenu dans un établissement. Lors de l'atelier, un enseignant m'a demandé s'il n'y avait pas un lieu pour trouver d'autres communautés de maths qu'il pourrait reprendre. Un peu comme on reprend certaines créations sur d'autres réseaux pour ensuite les adapter à sa manière. J'ai trouvé l'idée très intéressante et il faudra faire avancer dans ce sens.

Quoi de neuf

Ça me fait penser qu'il faudra que je règle la question du multiniveau. En effet, les élèves ayant demandé à ne pas changer de classe (sauf un) s'ils devaient passer au niveau 2, j'en ai discuté avec la direction qui doit donner son accord officiel, mais qui est très intéressée. Évidemment, cela règle les changements de classe et donc le côté administratif.
Pour ma part, c'est assez facile de différencier… sauf qu'il faut que je règle encore comment. Par exemple, la prochaine compétence sur les nombres relatifs contient deux éléments spécifiques: les additions et soustractions et les multiplications et divisions. Le niveau 1 ne doit être testé que sur le premier élément, le niveau 2 sur l'ensemble. La question est de savoir si je crée deux compétences distinctes ou une compétence avec des différences. J'ai pour l'instant choisi de tout mettre dans une seule compétence pour éviter d'en avoir trop. Mais la question de la validation se pose. Comme identifier l'expert qui a fait le niveau 1 ou le niveau 2? Je n'ai pas vraiment la réponse. Pour l'instant, je me dirige vers une validation de niveau 2 (les élèves de niveau 1 ne seraient pas validés cette année) et une différence sur le test… à clarifier donc. Mais question intéressante.

La suite

Cette semaine, le test sur les compétences Espace sera passé par les élèves et j'aurai donc un moyen de contrôler mon alignement. Ensuite nous partirons sur les nombres relatifs.
J'ai déposé l'arbre d'une élève qui est représentatif. Les compétences du premier groupe sont bien validées, mais pas encore celles du prochain test. Je vais donc prendre un moment pour que chacun puisse le faire avant le test.